Opérations Forestières

En vedette Nouvelles Nouvelles de l’industrie Récolte
L’avenir de la foresterie passe par la techno

5 janvier, 2023  par Maxime Bilodeau



Le visage de la foresterie pourrait changer du tout au tout d’ici les prochaines années grâce à l’avènement de nouvelles technologies. De quoi pallier un peu les enjeux de main-d’œuvre dans le secteur.

ForêtCompétences a consacré une bonne partie de la programmation de son 7e colloque annuel aux technologies d’avenir en foresterie. Opérations forestières a assisté à quelques-unes des conférences de cet événement qui marquait les 25 ans du comité sectoriel de main-d’œuvre en aménagement forestier. Environ 120 acteurs du secteur se sont réunis le 17 et 18 novembre dernier au Manoir du Lac Delage, au nord de Québec, pour l’occasion.

Place à la télédétection

Advertisement

Sa présentation portait en principe sur les drones en foresterie. Mais, Mathieu Varin, chef du laboratoire de télédétection forestière au Centre d’enseignement et de recherche en foresterie (CERFO), a fait valoir que ce sont les capteurs embarqués sur ces petits aéronefs qui représentent un intérêt en foresterie. « De toutes les options disponibles, c’est le LiDAR utilisé en combinaison avec l’imagerie hyperspectrale qui est la meilleure », a-t-il affirmé, avant de préciser que les coûts de telles technologies les rendent inabordables. « Je m’attends néanmoins à ce que les prix baissent d’ici la prochaine décennie. » 

L’intérêt pour la télédétection en foresterie est de nature à justifier cette attente. Mathieu Varin a par exemple présenté Opération LiDAR, une initiative du CERFO qui a pour objectif « d’accroître l’utilisation des produits dérivés du LiDAR dans le secteur forestier ». Rendue possible par le ministère des Ressources naturelles et des Forêts, Opération LiDAR s’articule autour d’offres de remboursement pour l’achat d’équipements ainsi que de formations en ligne qui visent à explorer la technologie et ses possibilités.

Le scientifique en a aussi profité pour communiquer les résultats de quelques travaux réalisés par le CERFO. Avec son équipe, il a par exemple mis au point une méthode développée pour détecter et cartographier automatiquement, grâce à l’intelligence artificielle (IA), les chemins forestiers à partir de données LiDAR. « Pour l’instant, les drones sont utilisés pour réaliser des inventaires, mais très peu dans le cadre d’opérations », a souligné Mathieu Varin. En cause : l’autonomie limitée de ces engins dont la capacité de transporter des charges est par ailleurs limitée.

Dans la stratosphère

Hormis en de très rares circonstances, un pilote de drone ne peut pas quitter des yeux son aéronef. Un problème que ne posent pas les plateformes stratosphériques lancées par l’entreprise almatoise Lux Aerobot. Comme leur nom l’indique, ces gigantesques ballons occupent la seconde couche de l’atmosphère terrestre, de 18 à 25 km d’altitude environ, « là où il n’y a pas trop de trafic », a illustré Katrina Albert, la cofondatrice de l’entreprise de robotique spatiale. « Une fois déployés, ils captent des images thermiques et optiques sur des diamètres de l’ordre de 50 km », a-t-elle souligné.

Mais, quelle est l’utilité de cette technologie en foresterie? La précision des clichés captés, a expliqué l’entrepreneure devant une assistance amusée. « Nous sommes capables de prendre des images avec une résolution de 1 m par pixel, voire de 10 cm par pixel. Cela est fort utile par exemple dans la lutte aux feux de forêt », a indiqué Katrina Albert. De fait, les ballons stratosphériques de Lux Aerobot ont été lancés en Saskatchewan l’été dernier afin de voler au-dessus des régions des Prairies sujettes aux feux de forêt, peut-on lire dans un communiqué de Transports Canada.

Bien autres applications sont possibles. Selon Katrina Albert, les plateformes de son entreprise pourraient aider à déterminer l’emplacement optimal des chemins forestiers sur un territoire donné grâce à la topographie de ce dernier est les essences qu’on y trouve. En théorie, elles pourraient même permettre le suivi de la faune en temps réel, ou presque! « La production de données et leur exploitation sont le nerf de la guerre en contexte de pénurie de main-d’œuvre », a-t-elle soutenu en s’appuyant sur un rapport de la firme McKinsey Global Institute.

Foresterie connectée

Philippe Giguère, professeur au Département d’informatique et de génie logiciel de l’Université Laval, est du même avis. « L’idée est d’amplifier le potentiel humain par la technologie », pas de le remplacer, a spécifié le codirecteur du Laboratoire de robotique boréale (Norlab). Si nous excellons lors de situations exceptionnelles, ce n’est pas le cas lorsque nous sommes confrontés à de grands ensembles de données, comme c’est souvent le cas en foresterie. « L’apprentissage profond [une branche de l’IA] peut nous aider à prendre de meilleures décisions en pareilles circonstances. »

Philippe Giguère a illustré son propos à grand renfort d’exemples propres à la foresterie. Le chercheur a ainsi traité d’Arboreal Forest, une jeune pousse suédoise dont l’application pour téléphone intelligent permet de réaliser plusieurs des principales mesures d’inventaires forestiers, et ce, avec une faible marge d’erreur. Il a aussi abordé le cas du fabricant finlandais Ponsse qui a récemment équipé l’une de ses abatteuses d’un LiDAR. Ce dernier fournit la position exacte des arbres à proximité de la machine, facilitant au passage la vie de l’opérateur.

Déplacement autonome de la machinerie en forêt. Coupes automatiques à partir de têtes d’abattage instrumentées. Réalisation d’un inventaire forestier par un robot. Tout au long de sa présentation, Philippe Giguère a fait miroiter un avenir où la foresterie serait de plus en plus connectée. « Dans les laboratoires, nous sommes environ quatre ans en avance sur l’industrie. Les technologies que nous développons aujourd’hui ont besoin à la fois d’être consolidées avant de pouvoir être commercialisées », a-t-il conclu.


Imprimer cette page

Advertisement

Stories continue below